Chers amis,

Nous vous partageons cette homélie d’un de nos frères,
en souhaitant qu’elle puisse soutenir chacun dans sa marche, ces jours-ci…. jusqu’au matin de Pâques ! 

Pour lire le texte : 

Evangile selon saint Jean, chapitre 11, versets 1 à 45

     La liturgie de la Parole d’aujourd’hui propose également une lecture brève de l’Évangile. Mais j’ose baser mon homélie sur une version encore plus courte – composée de trois phrases et dans l’ordre inverse de celui écrit par Saint Jean (ce qui ne signifie malheureusement pas que l’homélie sera courte – désolé).

Ces trois phrases que je voudrais commenter aujourd’hui sont :

« Lazare est mort, et je me réjouis de n’avoir pas été là, à cause de vous, pour que vous croyiez. »

« Revenons en Judée. »

 « Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. »

La première phrase :

« Lazare est mort,
et je me réjouis de n’avoir pas été là,
à cause de vous, 
pour que vous croyiez. »

     Cette première phrase, je voudrais la commenter avec le témoignage d’un médecin de 38 ans qui excerce dans un hôpital en Lombardie, où beaucoup de Lazares meurent chaque jour pendant cette période et où Jésus semble être ailleurs :

« Même dans mes cauchemars les plus sombres, je n’aurais jamais imaginé voir et vivre un jour ce qui se passe depuis trois semaines dans notre hôpital. Le cauchemar se répand. Le fleuve devient toujours plus grand.

Au début, arrivaient seulement quelques personnes malades, puis des dizaines, des centaines et maintenant, mes collègues et moi, nous ne sommes plus des médecins, mais des trieurs qui décident qui doit vivre et qui devrait être renvoyé chez lui pour y mourir ; même si toutes ces personnes ont payé leurs impôts toute leur vie.

Il y a encore deux semaines, mes collègues et moi étions athées, c’était normal pour des médecins ; nous avons appris que la science exclut la présence de Dieu. J’ai toujours ri de mes parents qui allaient à l’église.

Il y a neuf jours, un prêtre de 75 ans est venu nous voir. Un homme bon. Il avait de graves problèmes respiratoires mais, il avait une Bible avec lui, il nous a impressionné : il en lisait un extrait aux malades et il leur tenait la main. Nous étions tous fatigués, découragés, physiquement et psychiquement épuisés, et un jour nous avons trouvé le temps pour l’écouter. Maintenant nous devons admettre que nous, en tant qu’êtres humains, nous avons atteint nos limites ; nous ne pouvons plus rien faire et de plus en plus de personnes meurent chaque jour. Nous sommes épuisés, nous avons deux collègues qui sont morts et d’autres ont été infectés.

Nous avons réalisé que lorsqu’un homme ne peut plus rien faire, nous avons besoin de Dieu et nous avons commencé à Lui demander de l’aide chaque fois que nous avions quelques minutes de libres. Nous échangeons entre nous et nous avons du mal à croire que, d’athées bien trempés, nous soyons maintenant chaque jour à la recherche de notre paix, demandant au Seigneur de nous aider à résister afin que nous puissions prendre soin des malades.

Hier, le prêtre de 75 ans est décédé, ce prêtre qui jusqu’à ce jour, et malgré les 120 morts en 3 semaines, et bien que nous soyons tous exténués, détruits, ce prêtre avait réussi, malgré ses conditions de santé et nos difficultés, il avait réussi à nous apporter une paix que nous n’espérions plus.

Le prêtre s’en est allé vers le Seigneur et nous le suivrons nous aussi bientôt, si ça continue comme ça. Je ne suis pas rentré chez moi depuis six jours. Je ne me souviens pas quand j’ai mangé pour la dernière fois. Je me rends compte de mon inutilité sur cette terre et je veux consacrer jusqu’à mon dernier souffle à aider les autres. Je suis heureux d’être revenu à Dieu, alors que nous sommes au beau milieu de la souffrance et de la mort de nos semblables. »

 

     Ce médecin, dans un lieu de souffrance et de mort, a trouvé une vie nouvelle. C’est l’un des miracles de la résurrection, là où il semble être trop tard pour quoi que ce soit. Et pourtant, le plan de Dieu a son histoire propre… « pour que vous croyiez. »

 

« Revenons en Judée. »

 

     Cette phrase doit être complétée par les circonstances dans lesquelles elle a été prononcée : « Les disciples lui dirent : « Rabbi, tout récemment, les Juifs, là-bas, cherchaient à te lapider, et tu y retournes ? » »…

 

     Jésus, qui retourne dans un endroit “dangereux”, un lieu de persécution, de mort – pour y révéler sa gloire. C’est devenu l’expérience de ce médecin de Lombardie à travers les événements extérieurs qu’il a vécus.

 

     Mais n’est-ce pas aussi une invitation pour chacun et chacune d’entre nous à suivre intérieurement le même chemin ? Une invitation à aller courageusement avec Jésus dans ces espaces de notre cœur où nous ne voulons pas retourner ? Dans nos blessures, nos péchés, nos incapacités, nos folies qui nous lapident ? C’est là que Dieu peut révéler sa gloire – mais pour le faire, il a besoin de notre présence.

 

     Enfin, la dernière phrase, qui est en fait la première phrase dans l’ordre du récit, mais que nous ne pouvons comprendre qu’au bout du chemin :

 

« Cette maladie ne conduit pas à la mort,
elle est pour la gloire de Dieu,
afin que par elle le Fils de Dieu
soit glorifié. ».

 

      Avant que l’oeuvre de Dieu ne soit achevée, on ne peut que constater les contradictions : d’abord Jésus dit que cette maladie ne conduit pas à la mort, puis il dit que Lazare est mort… .Notre réalité actuelle est également remplie de ces contradictions, que souvent nous ne comprenons pas. Nous voyons différents processus et leurs conséquences humaines.

     Dans notre lutte quotidienne contre la souffrance – tant extérieure qu’intérieure – nous ne voyons souvent que la mort de Lazare. Et pourtant, cette réalité est pénétrée par une autre réalité, invisible, qui fait que ces processus visibles prennent pour nous un sens différent.

     Notre histoire personnelle et l’histoire du monde entier, en Dieu, ont leur propre déroulement et leur propre terme. Un terme qui nous permet de dire en toute confiance que « cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. »

Nous restons en communion de prière avec vous tous !

Bien fraternellement,

tous les frères et soeurs de Vézelay.

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